Photos
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00:23:34
by Philippe Jonckheere (de) | April 22, 2003 00:23:34
Faire bouillir une casserole d'eau, au point d'ébullition, y jeter les pâtes, des Penne complets, puis dans une autre casserole, faire réchauffer au bain-marie le contenu d'une briquette longue conservation de coulis de tomates, après le respect impérieux du temps de cuisson tel qu'il est préconisé sur l'emballage des pâtes, six minutes, jeter prestement (presto!) les pâtes dans une écumoire, les dresser dans une assiette, y incorporer le coulis tiède et saupoudrer de parmesan, déguster pendant que c'est encore chaud, éviter absolument de manger un tel plat refroidi.
day 22042003.txt 1/2 keywords Pâte -
00:25:45
by Philippe Jonckheere (de) | April 22, 2003 00:25:45
Et prenant cette photographie de mes pâtes baignant dans leur jus, à l'arrière-plan, on ne manque pas de remarquer l'extincteur de rigueur en salle de repos qui paraît émerger des pâtes floues, je me dis qu'il va être difficile, compliqué, sinon même impossible, de respecter les consignes de ne pas faire de belles photographies, non que je sois toujours ravi du résultat de toutes mes photographies, mais je serai bien en peine, en y mettant la meilleure volonté du monde, de faire le tri dans toutes ces photographies et vous épargner celles qui soient réussies, si tant est qu'elles soient belles, puisque généralement prenant une photographie, j'ai cette habitude bornée de faire en sorte qu'elle soit motivée par toutes sortes de considérations esthétiques, parfois même, j'en rougis devant vous, qu'elle présente quelque agencement de formes et de couleurs plaisant à l'oeil. Alors goûtant mes pâtes et ayant reposé l'appareil-photo sur la table à la place habituellement dévolue au verre, c'est-à-dire en tête d'assiette, je déclenche hardiment, et sans regarder dans le viseur, l'appareil, l'objectif posé à même le formica peu engageant de la table de la salle de repos et, considérant la photographie ainsi prise, je lui trouve naturellement des qualités qui me rendent perplexe quant à mes chances de parvenir à honnêtement expurger les photographies qui soient belles parmi celles que je me propose de prendre pendant les prochaines vingt-quatre heures. Ce n'est donc pas gagné.
day 22042003.txt 1/2 keywords Table -
00:40:04
by Philippe Jonckheere (de) | April 22, 2003 00:40:04
De retour de la cuisine, j'entame de consigner mes première notes dans le fichier de bloc-notes que j'ai ouvert à minuit et que j'ai finalement enregistré sous le nom de 22042003.txt, on s'y retrouve comme on peut dans l'arborescence de son disque dur, ce que je commence à noter de cette journée, qui commence la nuit, me voit sans cesse me prendre les pieds dans le tapis à écrire ou photographier que je suis en train d'écrire ou de photographier, d'ailleurs ce que je fais surtout c'est que j'écris que je photographie et je photographie que j'écris, pour photographier que je photographie il me faudrait un second appareil-photo, je n'ai pas pensé à me munir d'une autre appareil, suis-je distrait! (pourtant je savais bien que j'allai finir par me lancer dans ce genre de boucles), je pars donc mal équipé en terrain récursif, mais à la réflexion n+2 pour photographier que je me photographie photographiant pour bien faire il faudrait donc n appareil-photo. A la rigueur je peux écrire que j'écris et écrire que je me décris écrivant et ainsi de suite, mais quel intérêt?, on a tous compris ce que je voulais dire.
day 22042003.txt 1/2 keywords écran, Texte -
00:55:22
by Philippe Jonckheere (de) | April 22, 2003 00:55:22
Je reprends mes notes, donc j'écris que j'écris pour ainsi écrire. J'écris comme un cochon, ce qui d'ailleurs me pousse à ne plus écrire avec un stylo dont force m'est de constater que je suis devenu incapable, nous y gagnons, tous, moi le premier, en lisibilité, pour ma part en relisibilité.
day 22042003.txt 1/2 keywords Texte, écriture -
01:25:35
by Philippe Jonckheere (de) | April 22, 2003 01:25:35
Je m'octroie une pause, et descends au rez-de-chaussée où j'interagis, à mon corps défendant, avec un distributeur de bouteille d'eau minérale gazeuse de marque Badoit dont la gestion revient au comité d'entreprise de l'entreprise dont je suis salarié: interagis-je avec l'appareil distributeur, le comité d'entreprise ou l'entreprise elle-même, ou même encore avec l'entreprise Badoit?, il m'en coûte, littéralement, un jeton. Ces jetons sont une véritable monnaie de singe, ainsi dans mon entreprise ils coûtent cinquante centimes d'euros pièce, façon de parler pour un jeton, tandis que dans d'autres sociétés, on peut les acquérir pour moins, les même jetons, qui pareillement permettront d'acquérir une bouteille d'eau minérale fraîche ou un café bien chaud, et chose étonnante sur certaines aires de repos ou sur certaines stations-services, d'autoroute les machines à café sont pareillement opérables à l'aide d'un de ces jetons dont le prix est inabordable, un euro le jeton, rendez-vous compte. Je me souviens que descendant dans les Cévennes en voiture en compagnie d'un collègue de travail, nous avions acquis des cafés à bon marché sur une de ces aires d'autoroute à l'aide de jetons du café que nous avions d'avance du boulot, minimale résistance bien sûr, mais qui nous avait mis en joie. De façon nettement moins anodine, l'acheminement mécanique des bouteilles vers un guichet duquel, celui qui a inséré un jeton dans la fente idoine, peut récupérer (mais vous avez tous déjà utilisé un distributeur automatique, je ne vous fais pas un dessin) ce qui devient son bien, cet acheminement d'automate provoque chez moi toutes sortes de pensées douloureuses qui ont cette racine dans l'image (une gravure dans les tons bistres, rehaussés de cernes noirs) vue, dans l'hebdomadaire l'Express, à l'occasion de la mort de Mao Tsé Toung, en 1976 donc, à l'âge de onze ans et qui représentait une scène d'exécution en série par décapitation au sabre, en Chine donc, et comment dans l'alignement des condamnés agenouillés se tient tapie l'impression épouvantable que ces exécutions sont éternelles, qu'elles vont durer de façon infinie.
day 22042003.txt 1/2 -
02:02:22
by Philippe Jonckheere (de) | April 22, 2003 02:02:22
Je suis fasciné par les lieux déserts, ces endroits qui grouillent de monde en semaine et dont nous sommes, mes collègues et moi, de l'équipe de suppléance, les seuls habitants pendant le week-end. Cela fait des années que je me promets de prendre des photographies de ces lieux oxymores dans ce qu'ils sont prévus pour l'affluence et qu'ils sont justement déserts, projet pour lequel j'applique avec mon savoir-faire coutumier une efficace procrastination, et je suis amusé de voir que cette application obéissante aux consignes déjà énumérées m'entraine à faire des choses dont jusqu'à présent j'avais repoussé avec opiniâtreté l'exécution aux lendemains.
day 22042003.txt 1/2 keywords Cafétéria -
02:07:09
by Philippe Jonckheere (de) | April 22, 2003 02:07:09
De retour en salle, des collègues sont en proie à quelques difficultés pour réparer une tâche d'archivage d'une application à la conception ancienne, pas sur que je parviendrais à expliquer à tous ce qui est en jeu ici, pas toujours très sur moi-même de comprendre, donc ne nous y risquons pas. Je leur conseille de ne rien faire en ironisant sur le fait que ça ils savent faire. Ils sont habitués à mes frasques, ils ne relèvent même pas.
day 22042003.txt 1/2 keywords Homme, Travailler -
02:39:54
by Philippe Jonckheere (de) | April 22, 2003 02:39:54
Je fais quelques photographies de ce que nous renvoie la myriade d'écrans qui nous entourent, il y a bien longtemps que je ne prête plus qu'une attention de principe très relative à ce que ces écrans représentent vraiment, une manière d'abstraction aux contours mal définis, une vue de l'esprit vraiment, un amalgame binaire dont les ramifications sont tous les jours plus nombreuses et nous sommes en quelque sorte de plus en plus en peine de les comprendre toutes.
day 22042003.txt 1/2 keywords écran, Ordinateur, Texte -
02:40:45
by Philippe Jonckheere (de) | April 22, 2003 02:40:45
Je me souviens comme à mes débuts dans ce drôle de métier, j'étais fasciné de voir à quel point mes collègues d'alors ne semblaient pas percevoir combien l'univers dans lequel ils évoluaient était tout droit sorti de livres de science-fiction et comment leurs invectives nombreuses, contre la bécane, quand les choses n'allaient pas comme elles auraient dû, comment ces jurons les emmenaient dans ces territoires incertains du dialogue entre des êtres humains et leur propre construction et puis je suis devenu l'un d'eux, je ne m'arrête plus au débit sans fin des consoles de systèmes informatiques qui dégueulent du message dont très peu du contenu sert effectivement à quelque chose, on dit d'un système ou de sa console qu'ils sont "bavards", ce bavardage contribue surement à la perdition des hommes qui s'en préoccupent.
day 22042003.txt 1/2 keywords écran, Ordinateur, Texte -
02:42:43
by Philippe Jonckheere (de) | April 22, 2003 02:42:43
Cette réalité là pour peu qu'elle appartienne effectivement au réél (pourtant je vous assure il y a derrière tout cela des sommes trébuchantes folles dont les montants donnent sans mal le vertige __ il s'agit là du fameux marché de l'information, celle qui permet, enfouie dans le bavardage de la machine, d'influer efficacement sur la destinée financière des entreprises, notamment en lui donnant l'opportunité de réduire son personnel, quel beau métier!, lui donnant avantage ou longueur de retard sur ses concurrents) est à l'image de ces écrans de veille pour lesquels les ordinateurs personnels mettent les écrans au repos en construisant, à toute allure, des labyrinthes tubulaires dessinés en perspective à deux points de fuite irréprochable, opération vaine mais réalisée à une vitesse vertigineuse, spectacle pour fascinant qu'il puisse être si l'on veut bien y prêter un peu attention mais qui n'en est pas moins relégué à ces choses mille fois vues et qui sont produites pour cette seule raison qu'il ne coûte rien de les produire, c'est gratuit, mais je n'irai pas jusqu'à dire que cela ne prête pas à conséquence.
day 22042003.txt 1/2 keywords écran, Bleu, Ordinateur, Texte