Photos
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08:20:04
Par Philippe Jonckheere (de) | 22 avril 2003 à 08:20:04
Nathan a encore mal garé son tracteur.
Journée 22042003.txt 1/2 Mots-clés Jouet, Tracteur -
08:17:45
Par Philippe Jonckheere (de) | 22 avril 2003 à 08:17:45
Ces reflets du matin, comme de la fin du jour, me font souvent regretter qu'il ne soit pas possible de les enregistrer directement sur du papier photographique en le plaquant contre le mur qui reçoit ces ombres à la façon d'un rayogramme de grande taille, mais il faudrait, pour cela, pouvoir commander deux éclipses de soleil de suite, instantanées et séparées d'une demi-douzaine de secondes, guess and hope, le temps de sortir le papier du rouleau, de le couper, et de l'adosser au mur, et, une fois exposé, de le serrer dans un tambour de développement.
Journée 22042003.txt 1/2 Mots-clés Mur -
08:15:23
Par Philippe Jonckheere (de) | 22 avril 2003 à 08:15:23
Puiseux-en-Bray, la maison en face de l'école. Le jardin le matin. Ce pin penche dangereusement comme beaucoup semblent le penser (notamment dans le village), je puis vous dire que depuis cinq ans je mesure l'angle de son inclinaison comme j'ai pû apprendre à le faire en étudiant le dessin pour préparer le concours d'entrée aux Arts Décos, en inclinant un crayon à bout de bras et de reporter cette inclinaison, le bras toujours tendu, sur le papier, je puis vous dire donc, que cet arbre certes n'a pas poussé droit mais que cette inclinaison est restée constante. Et pourtant je suis sûr que le prochain propriétaire de cette maison aura à coeur de le faire abattre. A cause du danger. Un peu comme certains maires de communes du sud de la France font abattre des alignements de platanes centenaires qui bordent les routes au prétexte que ceux-ci causent des accidents mortels de voiture: quelle mauvaise foi !, ce sont les arbres immobiles qui sont accusés et les bolides énervés et mal conduits par des conducteurs énervés, et qui se conduisent mal, qui jouent le rôle de la victime. Quel roi fit donner des coups de bâtons à la mer parce qu'elle avait noyé son fils? (Xerxès)
Journée 22042003.txt 1/2 Mots-clés Arbre -
08:12:34
Par Philippe Jonckheere (de) | 22 avril 2003 à 08:12:34
De fait nous déménageons mi-juillet et, Anne et moi, dans nos discussions, prenons plaisir à ranger, mentalement, ce que nous laissons volontiers ici, derrière nous, et ce qu'au contraire nous regretterons. Nous laissons sans regret Puiseux-en-Bray à ses habitants qui votent massivement pour le Front National, peureux de l'étranger, et des étrangers naturellement, jusqu'au pathétique, envieux aussi dans leurs maisons cossues qui courbent vaillamment l'échine sous l'humidité hivernale, en revanche je regretterai énormément le bout de route entre Sérifontaine et Puiseux-en-Bray.
Journée 22042003.txt 1/2 Lieux Puiseux-en-Bray -
08:03:12
Par Philippe Jonckheere (de) | 22 avril 2003 à 08:03:12
Traverser Gisors toujours en direction de Dieppe, deux kilomètres après Sérifontaine obliquer en direction de Saint-Germer-de-Fly, jusqu'à Puiseux-en-Bray. L'exemple même d'un projet inabouti: depuis le début de l'année je photographie ce champ, à chaque fois que je passe devant, et j'avais dans l'idée, commençant ce projet, au début de l'année donc, que je devrais photographier ce champ toute l'année, façon de saisir le passage du temps, et des saisons, sur ce champ. Nous déménageons mi-juillet et je ne pense pas que j'aurais le loisir de revenir régulièrement jusqu'ici pour photographier ce champ. Dans tous les projets que j'ai pû entreprendre et dont l'écoulement du temps fût le sujet, il semble que ce soit toujours précisément l'écoulement du temps qui les ai rendus impossibles ou irréalisables.
Journée 22042003.txt 1/2 Mots-clés Prairie -
07:59:22
Par Philippe Jonckheere (de) | 22 avril 2003 à 07:59:22
Dimanche en fin d'après-midi, ça y est, je repars à la maison. Je quitte François, nous nous embrassons, d'être à ses côtés me fait toujours tellement de bien. La route est belle, le soleil rasant, les plaines ondulées de la Champagne pouilleuse ne me font plus peur, la route est inondée de lumière, je ne suis pas pressé, quand j'arriverai les enfants seront couchés, j'irai les embrasser et leur caresser les cheveux, les recouvrir aussi. Je prendrai Anne dans mes bras, et je pense même que j'aimerai décrire plus tard dans ces lignes cette étreinte, j'aimerais aussi parvenir à écrire ces paysages déserts rayés comme par une balafre par la Nationale 4. La nuit tombe et mes pensées ne s'assombrissent pas avec les collines, j'aime les voyages en voiture de nuit. Les alentours de Paris sont difficiles à négocier, une épaisse confiture de circulation, je passe littéralement sous les fenêtres du travail, je m'arrêterai presque prendre un café, mais tout de même la hâte de revoir Anne est là, alors à bout d'efforts de patience de tant d'embouteillages, je finis par rejoindre l'autoroute de Cergy-Pontoise et à plus vive allure maintenant je me dirige vers les plaines du Vexin. Au rond-point de Branchu, une camionette me passe sous le nez et manque de peu de sortir de la route, mais se rattrape in extremis, je me dis ouf, il s'est bien repris. Et puis je la suis et je m'aperçois tout de suite que son conducteur doit être ivre, il fait des embardées en dépit d'une route rectiligne, zig-zague sans cesse, flirte tantôt avec le fossé tantôt avec les voitures d'en face, il roule à tombeau ouvert, je fais des appels de phare, les voitures, nombreuses dans l'autre sens, celui des retours de fins de semaine à la campagne, dans le sens Province-Paris, comme on dit à la radio, les voitures en contre-sens donc, se serrent le plus possible sur leur droite, l'une d'elle est accrochée, mais la camionette n'en a cure qui poursuit son chemin à toute berzingue, je suis désemparé, je ne peux rien faire, je le suis péniblement, ma petite Peugeot diesel poussive fait de son mieux. La camionette commet des embardées de plus en plus spectaculaires, c'est certain, elle va finir par tamponner une voiture dans l'autre sens, c'est une très longue ligne droite qui sépare Branchu de Gisors, dans l'autre sens, une file ininterrompue de phares, et la camionette continue de filer comme si elle choisissait sa victime, car je le sais elle va finir par tuer quelqu'un dans l'autre sens, le genre de face-à-face dont la presse locale se plait toujours à dresser des bilans ordonnés en nombre de pères et de mères de famille et d'enfants. Je cherche une solution, plusieurs fois en douze kilomètres de cette interminable ligne droite, je me dis que ça y est, mais non la camionette redresse sa trajectoire mortelle au dernier moment, c'est affreux, je mords nerveusement mon col roulé, et je réfléchis, je réflechis de toutes mes forces, qu'est-ce que je peux faire?, les appels de phares sont lettres mortes, m'arrêter à une borne et appeler au secours, non, nous allons arriver dans cinq kilomètres à Gisors, je ne crois pas que la gendarmerie aurait le temps de faire quoi que ce soit, je ne vois qu'une seule solution, je le suis, au rond-point de Gisors, il sera obligé de s'arrêter, je sors de la voiture et je saute sur le conducteur, je lui prends ses clefs et je les jette dans le champ d'à côté, le plus loin que je puisse. Je ne vois rien d'autre à faire. Dans la descente qui arrive sur Gisors, la camionette va être ralentie par une voiture qui descend prudemment, je me dis que nous sommes sauvés que je l'aurais au rond-point, la camionette freine et tout d'un coup perd le contrôle et va se jeter sur une voiture qui remonte dans l'autre sens, c'est un choc terrible, un fracas épouvantable, le mélange du verre cassé, de l'acier contre l'acier et aussi du plastic qui casse, c'est ce bruit là. C'est étrange, parce que pour une seconde je me sens libéré: c'est arrivé, il n'y a plus rien à faire. Je freine. Je fais arrêter la voiture qui me suit, lui dit de faire de même avec les suivantes. Je cours à la voiture accidentée, celle percutée par la camionette, cette voiture n'a plus forme de voiture. Dedans il y a un homme inerte, le moteur de sa voiture sur les genoux, le pare-brise en travers de la gorge, je lui prends le poignet, je ne trouve aucun pouls, je cherche le pouls à la pomme d'Adam, je ne trouve rien, je m'arrête, je ne suis pas médecin, je ne sais pas quoi faire, je relâche le poignet de cet homme inerte, d'autres conducteurs sont sur les lieux et me demandent s'il est mort je leur dis de se taire, je sais que l'ouie est le dernier sens en éveil dans l'agonie, avec de la chance les secours arriveront à temps. Pour lui, je ne sais pas quoi faire et je me dis que l'autre, celui qui roulait comme un fou, lui est sans doute blessé, je vais voir, il est sonné, mais il n'a rien, apparemment rien, il est saoul comme un Polonais, l'haleine fétide et le regard vitreux. Je demande aux gens aux alentours de ne pas le quitter d'une semelle, les secours arrivent, ils se jettent sur l'homme encastré dans sa voiture comme parfois les vieux murs de pierre le sont par la végétation, ce n'est pourtant pas le moment de faire des images, mais c'est celle qui me vient à l'esprit, un pompier soulève le toit de tôle, dégage la poitrine et entamme un massage cardiaque, est-ce qu'il y a de l'espoir?, je voudrais y croire. J'aide un autre pompier à porter secours à celui qui n'a rien, mais il n'a rien, le pompier s'en occupe parce qu'il a deviné que c'était lui l'assassin, mais les assassins sont des hommes, je suis d'accord avec le pompier, il faut s'en occuper, pendant que le pompier infirmier l'ausculte, j'ai posé ma main sur son épaule, c'est l'épaule d'un homme, et je me dis qu'il a des épaules comme celles de mon ami François, je sais qu'il a tué, mais c'est l'épaule d'un homme, encouragé par le pompier, je lui parle, je lui demande si cela va, on s'en occupe mais il n'a rien, on l'embarque tout de même sur un brancard. Un médecin du Samu est arrivé, il se porte au secours de l'homme prisonnier de la tôle, rapidement, il ressort et fait signe aux infirmiers qui arrivent avec grand renfort de matériel de réanimation qu'il n'y a plus rien à faire, il demande un drap et recouvre le mort. Je m'effondre. Je n'ai rien pû faire. Un pompier vient me voir, je lui dis tout, la lotterie, les douze kilomètres d'à-qui-le-tour, l'impuissance, on était presque à Gisors j'allai pouvoir fairequelque chose, il est trop tard maintenant. J'ai la tête qui tourne, les jambes en coton, on m'assoit, on prend ma tension, je suis inconsolable. Cet homme je n'ai pas pû le sauver et l'autre l'arrêter. Je vais m'évanouir, c'est toujours ce que je fais quand je refuse la réalité. On m'allonge dans un brancard, on prend mon nom, je parle de ma voiture plus haut, elle est restée ouverte avec le Mac de François à l'arrière, l'appareil-photo sur le siège, je donne la clef à un pompier, il va s'en occuper. Je suis conduit à l'hôpital. Aux urgences, je manque de me casser la gueule en sortant du camion des pompiers, on va chercher un fauteuil roulant (je ne suis pas le genre de personnes qu'on porte, on me roule). Aux urgences, je suis dans une salle, juste à côté de celle du chauffard qui fait du scandale maintenant, et qui demande à partir. On me donne un calmant, j'appele Anne qui se faisait un sang d'encre, pour la rassurer mais en pleurant tout du long, je ne crois pas que je la rassure beaucoup, je lui dis juste que je n'ai rien. C'est étonnant d'ailleurs parce que je n'ai rien mais je suis branché de partout à un moniteur de survie. Les calmants font effet, les infirmiers sont aux petits soins, ils sont ce que les hommes et les femmes peuvent être les uns pour les autres. A côté le chauffard éructe, il ne cesse d'arracher ses branchements divers au moniteur des fonctions vitales, tous nous nous taisons, nous pensons tous qu'il est tellement saoûl qu'il ne se rend pas compte de ce qu'il a fait. Le médecin du SAMU est de retour, il s'encquiert de comment je me sens. Je lui demande ce que j'aurais pû faire, il me dit, rien, le pauvre gosse est mort sur le coup. C'est fini, un gendarme vient enregistrer ma déposition, il écrit, pour moi, à la première personne du singulier, ses phrases sont précises et brèves, rien à voir avec les miennes, je signe.
C'est arrivé précisément à cet endroit, le 23 mars 2003, là où le camion va croiser, sans encombre, cette voiture venant de Gisors.Journée 22042003.txt 1/2 Lieux Autoroute -
07:55:02
Par Philippe Jonckheere (de) | 22 avril 2003 à 07:55:02
Photographie des plaines du Vexin dans la lumière du matin, l'appareil est resté réglé comme pour la photographie précédente c'est à dire en position macro, m'apercevant de mon erreur, j'ai eu le temps de régler la mise au point, au contraire sur l'infini, ce qui a donné une photographie certes réussie pour ce qui est de la mise au point mais qui n'a évidemment pas les qualités de celle-ci, j'ai donc gardé la photographie floue et supprimé celle qui était nette.
Journée 22042003.txt 1/2 Mots-clés Flou -
07:53:00
Par Philippe Jonckheere (de) | 22 avril 2003 à 07:53:00
Contes et Légendes de Syldavie de Pascal Comelade.
Journée 22042003.txt 1/2 Mots-clés Auto-radio -
07:52:55
Par Philippe Jonckheere (de) | 22 avril 2003 à 07:52:55
Je viens de retrouver le petit fichier 16062002.txt écrit sur le bord de la route sur l'ordinateur portable du travail, précisément à cet endroit: Et puis ce matin, à l'aube, en rentrant très prudemment, luttant contre l'invasion du sommeil au volant, je me suis arrêté de nombreuses fois sur le côté, en marge de la route, une faible ondée mouillait les blés blondissants en silence(16 juin 2002).
Journée 22042003.txt 1/2 Mots-clés Prairie -
07:50:03
Par Philippe Jonckheere (de) | 22 avril 2003 à 07:50:03
Bifurquer ensuite vers Dieppe et Gisors. Le matin de bonne heure, toujours dans cette lutte inégale entre le sommeil envahissant et le conducteur dans la lune qui traverse les grandes plaines du Vexin, résistant tant mal que bien à la tentation de tout abandonner, je décide de m'arrêter là où je ne m'arrête jamais, là où d'habitude je n'ai même pas un regard pour les alentours apparemment condamnés au desert sans accident, au beau milieu d'une de ces étendues agricoles sans vie, à la faveur d'un chemin de terre qui oblique depuis la route. L'air est un peu mobile, l'endroit désert, il fait humide, je me suis éloigné de la route, une centaine de mètres, du coup les voitures qui filaient sur la longue ligne droite glissent sans le vacarme coutumier telles des navettes d'un autre temps. Au loin les nuages gorgés d'eau se fondent les uns dans les autres, toutes grisailles confondues, la lumière grise de l'aube pluvieuse est incertaine, la nuit retomberait derriè
re cette aube baclée que nul ne trouverait à redire. Au delà de Gisors, dans la vallée de l'Epte, les nuages sont au plus bas recouvrant tout d'un crachin qui ne tardera pas à m'envelopper, si je m'éternise ici, et rien ne m'en empêche vraiment. Ce paysage de plaine offre décidément le spectacle d'une grande monotonie. A l'approche des nuages lestés de pluie, le vent se lève sans grande conviction, je ferme les yeux et je me vois soudain en pleine mer (lors de mes incessants va et vients entre Portsmouth et le Havre), curieux quand même cette sensation marine au beau milieu de la plaine, de la terre, la fatigue rend ivre. Et le soir, je relis les notes des jours précédents de ce bloc-notes et je me morfonds de tant de médiocrité: que tout ceci est mal écrit, sans relief, l'image même de la plaine pluvieuse, il faudrait rayer tout cela d'un trait, gommer tous les laborieux reliefs et faire table rase, donner à entendre le silence de ce dimanche matin déchiré de temps en temps
par le passage épisodique de voitures filantes chuintant sur l'asphalte humide. Le silence demande cependant un courage que je n'ai pas, que je n'aurais jamais: je suis cet agité sempiternel qui tourne et retourne la tête aux quatre coins de l'oreiller à la recherche d'une fraîcheur toujours plus évasive, je remonte dans mon automobile et fais le bout de chemin restant en baillant et en braillant à tue-tête Baby you can drive my car pour me tenir éveillé.(6 octobre 2002)Journée 22042003.txt 1/2